Alors que les partis politiques maliens appellent à un nouveau rassemblement ce vendredi 9 mai à Bamako pour dénoncer leur dissolution forcée et exiger un retour à l’ordre constitutionnel, un visage manquera cruellement à la mobilisation : celui de Mamadou Traoré, dit “Le Roi”. Président du parti Alternatives pour le Mali et figure emblématique de la coalition Jigiya Koura-Espérance nouvelle, il a été arrêté le 24 avril, puis incarcéré, avant d’être traduit en justice le 12 juin pour “atteinte au crédit de l’État”.
Son crime ? Avoir osé critiquer le régime dans une interview diffusée sur les réseaux sociaux le 22 avril. Son emprisonnement, perçu comme une tentative de museler l’opposition, illustre la dérive autoritaire qui frappe le Mali. Pendant que les autorités répriment les voix dissidentes, la société civile et les partis politiques tentent de résister – mais jusqu’à quand ?
Les propos tenus par Mamadou Traoré dans une interview du 22 avril ont scellé son sort. Le président d’Alternatives pour le Mali y dénonçait avec virulence les dérives de la Transition : les membres du CNT perçoivent indûment des salaires de députés “à hauteur de milliards”, travaillent “pour leur intérêt personnel” et se taisent complaisamment face à la dissolution des partis. Il remettait aussi en cause la légitimité du référendum constitutionnel de 2023 et fustigeait les militaires “qui ne respectent pas leur parole” en s’accrochant au pouvoir.
Ces déclarations, diffusées par une webtélé, lui valent aujourd’hui des poursuites du redouté pôle anti-cybercriminalité pour “atteinte au crédit de l’État” et “diffusion de fausses nouvelles”. Un procès en forme de répétition pour ce militant aguerri, déjà emprisonné cinq mois en 2023 avec dix autres dirigeants pour avoir simplement tenu une réunion politique. Son parti paye un lourd tribut : un de ses membres écope d’un an de prison pour avoir qualifié les régimes de l’AES de “juntes”.
Transféré à la prison de Dioïla, à 160 km de Bamako, Traoré attend son procès du 12 juin dans un climat de répression généralisée. Depuis le début de la Transition, critiques politiques et voix dissidentes s’enchaînent devant les tribunaux ou disparaissent en détention extra-judiciaire. Une dérive dénoncée par HRW, Amnesty et la FIDH, mais qui se poursuit inexorablement, réduisant comme une peau de chagrin l’espace démocratique malien.